histoire

One thing I like about jazz, kid, is that I don't know what's going to happen next. Do you?

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Archibald est né par un doux matin de Février, dans la ville côtière de Savannah, en Géorgie. Il est le fils unique d’une famille de planteurs de tabac et de coton renommée dans la région, tant par leur sens des affaires que pour le patriotisme qu’ils ont eu durant la guerre civile. Des six fils de la famille O’Connell, le grand-père d’Archy fut le seul à revenir de la guerre de sécession. Cet ancrage de la famille O’Connell dans le Sud profond valut à leur fils son deuxième prénom : Lee, en honneur au Général Robert E. Lee, général en chef des armées confédérées. Vu la position et la richesse de ses parents, le petit Archibald vécut une enfance merveilleuse, bien loin de celles de beaucoup d’autres enfants. Il apprit l’équitation, et d’autres passe-temps qualifiés de noble par son père, qui le préparait à reprendre les rênes de la plantation familiale. Il fut également envoyé en pensionnat et à l’université à Atlanta, afin d’apprendre parmi les meilleurs et de devenir une des futures élites de la société du Sud. Son père lui trouva même une future épouse, un bon parti issue d’une des meilleures familles de la région, afin de perpétuer le nom des O’Connell.

Mais de l’autre côté de l’Atlantique, la guerre ravage l’Europe. Le jeune homme a 20 ans en 1914, et épris des idées de liberté, habité par l’esprit d’aventure, Archy manifeste son désir de partir combattre auprès des Français, comme l’avait fait pour eux le marquis de La Fayette, quelques années auparavant. Il reçoit un refus catégorique de la part de son paternel, et pour la première fois de sa vie, le jeune O’Connell décide de lui désobéir. Il lui faudra un an pour parvenir à ses fins. Enchaînant les petits boulots à côté de ses études, comme vendeur de journaux ou cireur de chaussures, il économise petit à petit la somme requise qui lui permettra d’acheter sa traversée de l’Atlantique. Ce n’est que quelques jours avant son départ qu’il annonce la nouvelle à ses parents, alors qu’il se repose en week-end dans la demeure familiale. La réaction de son père ne se fait pas attendre : Archy est déshérité, renié, et mis aussitôt à la porte. Las, le jeune homme s’en va vers l’Europe, sans se douter qu’il court probablement vers sa propre mort. Son seul soutien restera sa femme, qui malgré sa position vis-à-vis de sa famille, restera à ses côtés. Les deux époux ne se connaissent pas, et pourtant, elle restait son seul point de repère.

Le jeune homme arrive en France en automne 1915. Américain d’origine, il ne peut s’engager dans l’armée française puisque son pays n’est pas entré en guerre contre l’Allemagne. Archy s’engage donc dans la Légion Etrangère, changeant d’identité et de nationalité. Il y effectue son instruction en Algérie avant d’être envoyé sur le front au début de l’année 1916, au sein du troisième régiment de marche du 1er RE. C’est à Verdun qu’il effectuera ses premières armes, et c’est à Verdun qu’il crut ne jamais revenir d’Europe. Au mois de mars, lors d’un tir de l’artillerie prussienne, O’Connell est frappé par un shrapnel au niveau de l’omoplate gauche. Il est aussitôt rapatrié vers l’arrière et hospitalisé recevant par la même occasion la Croix de Guerre française. C’est lors de sa convalescence, peu avant son retour au front qu’il croise l’un de ses anciens camarades de l’université, William Thaw, fils d’un milliardaire de Pittsburg. Ce dernier, avec deux autres américains, servaient dans l’aviation française. C’est autour d’un copieux repas à Paris que William proposa à Archy de se faire muter dans l’aviation, et de passer son brevet. Ses études aidant, sa demande de mutation est acceptée par l’état-major et c’est en juillet 1916, après deux mois de formation qu’il reçoit enfin ses ailes de pilotes, et qu’il est versé au sein de la SPA 124, la fameuse escadrille Lafayette qui regroupe les volontaires américains qui combattent auprès des français. O’Connell découvre alors un autre visage de la guerre, vu d’au-dessus. Une guerre plus chevaleresque, une guerre plus personnelle, ou on voit son adversaire dans le blanc des yeux. Une guerre menée généralement par les fils des élites de l’aristocratie européenne, de jeunes gens qui se connaissent tous mais qui doivent se résoudre à s’affronter dans un genre de sport vulgaire devenu à la mode : le combat aérien.

La vie à l’escadrille était plutôt fastueuse. Le mess de l'escadrille était connu de tous les pilotes à la ronde. Il était subventionné par un riche américain et avait pour chef un ancien saucier du Ritz de New York. On ne comptait plus les aviateurs de passage qui, à l'heure des repas, se découvraient un ennui mécanique pour se poser et profiter d'une telle cantine, inquiets toutefois de devoir caresser les deux mascottes de l'escadrille, les lions Whisky et Soda. En fait, cette vie agréable ne doit pas cacher que ces jeunes pilotes risquaient leur vie chaque jour. Et des camarades, Archy en perdit un paquet. Lui-même se fit descendre, un jour, par un adversaire qui s’était avéré meilleur que lui. Une balle reçue dans l’épaule, et il était reparti en convalescence puis en rééducation pour quelques mois. C’est au milieu de l’année 1917, peu après l’entrée en guerre de son pays, que le jeune homme reçoit enfin ses galons d’officier et qu’il quitte, à contre-cœur, l’armée française pour servir enfin sous la bannière étoilée. L’escadrille Lafayette devenant officiellement américaine, c’est dans ses rangs qu’Archy finira la guerre, avec une vingtaine de victoires aériennes confirmées et créditées.

Lorsqu’arrive le 11 Novembre 1918 et l’armistice, Archy est désemparé. Le retour au pays lui fait peur, il sait surtout au fond de lui-même qu’il n’est plus le même homme et se demande ce que lui réserve le retour au pays. Lui, la guerre, c’est tout ce qu’il savait faire. De retour aux Etats-Unis, il est d’abord surpris par l’accueil réservé aux « héros » . A Savannah, il participe à de nombreuses parades où il est mis à l’honneur par des fanfares ou des parades. Il retrouve sa femme, qu’il apprend à connaître, mais toujours aucune trace de ses parents. Toutefois, le malheur s’abat très vite sur lui à nouveau. Au début de l’année 1920, peu de temps après son retour, sa femme meurt des suites d’une pneumonie. Seul, il a du mal à faire son deuil et décide de quitter la Géorgie pour changer d’air. C’est ainsi qu’il arrive à New York, et qu’il dégotta un emploi qu’il occupe encore aujourd’hui. Ses dons de pilote lui sont utiles, puisqu’il décroche un emploi dans l’US Air Mail Service. Facteur aérien, il effectue quotidiennement les liaisons postales entre New York et Chicago, Boston ou une quelconque autre ville du Nord Est des Etats-Unis. Grâce aux fonds qu’il a pu économiser, Archy s’est acheté son propre appareil et s’exhibe le week-end lors de meetings aériens, participant à des courses, à des shows de voltige ou effectuant des baptêmes de l’air pour arrondir ses fins de mois. L’aviation est devenue toute sa vie, il a même battu un record de distance –et par là même de vitesse- lors d’un trajet entre New-York et San Francisco. Mais la gloire sera éphémère : deux mois après, son record sera déjà battu.

Toujours plus vite, toujours plus haut. Tel est son crédo. Toute sa vie semble tourner autour du danger et de la volonté d’aller toujours plus loin. Il étudie d’ailleurs le projet d’un nouveau record : celui de traverser l’Atlantique d’une traite, espérant ainsi inscrire son nom dans la légende. Lorsqu’il ne vole pas, il boit, fréquentant les quelques bars clandestins de New York où il est connu et accepté. Fana de jazz et de musique noire depuis la guerre, c’est aussi pour cette raison qu’il les fréquente. Les temps sont durs mais il fait avec … Mais qui sait ce que l’avenir lui réserve ?

crédit © citylove (1&2), marlonbrando (3&4) & kingari

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